Guichard II, Sire de Beaujeu, fonda l'Abbaye de Joug-Dieu en 1137, destinée à recevoir les religieux de l'ordre de Saint-Benoît. Elle était située dans le voisinage de la Saône, au Pré de Joug, sur notre territoire. Cette abbaye a subsisté plus de 6 siècles mais n'a laissé aucune trace historique. Les abbés et religieux étaient presque tous issus de familles nobles du Beaujolais. La Chapelle Romane était entourée de vastes constructions. Pendant de longs siècles, ce sera l'existence d'un ordre plus soucieux d'observer les richesses, ne suivant que de loin les évènements qui agiteront le Beaujolais pendant les XVéme et XVIéme siècles. Le cours du Nizerand fut rectifié par leurs soins. Son lit bordé de saules et de peupliers fut creusé plus au Nord et les eaux de la jolie rivière arrosèrent les prairies de l'Abbaye.
En 1687, les religieux ennuyés de leur isolement près du rivage de la Saône dont les inondations rendaient leurs habitations malsaines, consentirent à se réunir au Chapitre de Villefranche, en apportant le revenu de leur travail, qui était très important, ce qui arrangea bien la Collégiale.
En 1741, un acte royal entérinait cette donation. Tout était donc fini et cette abbaye, pieuse fondation des premiers seigneurs de Beaujeu, avait vécu. En 1851, l'Abbaye tombait sous le pic des démolisseurs, les matériaux que l'on retira servirent à édifier et restaurer les murs d'un réservoir près du pont du Nizerand. En 1816, vers le cimetière situé au nord de la Chapelle, on découvrit 5 tombeaux creusés dans la pierre ; ils avaient la forme des sarcophages gallo-romains.
En maintenant que les ruines ont disparu, rien ne rappelle plus aux promeneurs les anciens possesseurs du domaine, les moines bénédictins qui vécurent là tant de siècles. Cette belle propriété appartenant au clergé fut vendue pendant la révolution, aux enchères. L'immense pré de Joux (plus de 100 ha) servit au début du siècle pendant plus de 30 ans de champ de courses à la Société Hippique de Villefranche.
De l'origine du nom originel de Joug-Dieu
En l'an 1115, Guichard III fonda le prieuré du Joug-Dieu, qui l'an 1137 fut érigé en abbaye, et l'an 1688, a été sécularisé, par son union à la collégiale de Villefranche. Il est bon d'apprendre de Guichard lui-même, le motif de la fondation de ce monastère et la raison de la dénomination qu'il lui fit. C'est ainsi qu'il s'exprime dans la charte qu'il fit expédier à ce sujet, l'an 1118, dans l'abbaye de Tiron, au Perche.
« Une nuit, dit-il, étant seul dans mon appartement de Thamais, j'eus la vision suivante : Six hommes vénérables, tout brillants de lumière, se présentèrent à ma vue, ayant des jougs à leur cou et tirant une charrue, sur laquelle était appuyé le saint homme Bernard, abbé de Tiron, un aiguillon à la main , avec lequel il les piquait , pour les faire tracer un sillon droit. A mesure qu'ils avançaient, je voyais sortir de terre des fruits en abondance. Après avoir longtemps réfléchi sur cette vision, j'allai trouver ledit abbé Bernard, à qui j'offris ce même lieu de Thamais, avec ses dépendances, pour y mettre Ies hommes qui, sous le joug du Seigneur, prieraient continuellement pour moi et les mien, ce qu'il m'accorda volontiers. Et pour conserver la mémoire de la vision dont je viens de parler, je veux que ce monastère s'appelle le Joug-Dieu »